Français modifier

Étymologie modifier

(XIIIe siècle) Variante de bogre signifiant « hérétique » au xie siècle, puis « débauché » au xiie siècle, lui-même issu du latin Bulgarus (« bulgare »). Les Bulgares étaient en effet membres de l’hérésie bogomile apparue au xe siècle dans les Balkans, et qui niait plusieurs sacrements, dont celui du mariage[1].

Nom commun modifier

Singulier Pluriel
bougre bougres
\bugʁ\

bougre \buɡʁ\ masculin (pour une femme, on dit : bougresse)

  1. (Vieilli) Sodomite.
    • Le bougre tente, mais ses feux trop ardens s'éteignent dans l'effervescence de l'entreprise. — (Donatien Alphonse François de Sade, La nouvelle Justine, ou Les malheurs de la vertu ; suivie de L'histoire de Juliette, sa sœur, 1797, page 43)
    • Si le roi Edouard le voit, bougre comme on le connaît, vous risquez fort que ce jouvenceau ne vous revienne jamais. — (Maurice Druon, Les Rois maudits I. Le Roi de fer, 1970, Le Livre de poche, 2022, page 126)
  2. (Par extension) (Injurieux) Personne méprisable.
    • — On m’appelait bandit, sapré gredin ! — Sapré pour sacré ; — elle disait aussi, bouffre pour bougre. — (Jules Vallès, L’Enfant, G. Charpentier, 1889)
  3. (Par extension) Individu coquin ou gaillard. — Note : Se dit alors souvent avec condescendance.
    • Pif ! Paf ! en voilà quatre d'assommés par ce grand bougre de lieutenant. — (Alfred Jarry, Ubu Roi, 1896)
    • – Sapristi, pensa Schmidt, qui n'avait d'abord écouté que d'une oreille, on dirait qu'il commence par le commencement, le bougre. — (Pierre Benoit, Le Soleil de minuit, Albin Michel, 1930, réédition Le Livre de Poche, page 89)
    • Un beau jour mon grand-père me dit négligemment : « Courteline doit être un bon bougre. Si tu l’aimes tant, pourquoi ne lui écris-tu pas ? » — (Jean-Paul Sartre, Les mots, 1964, collection Folio, page 60)
    • Ce sont de bons bougres, toujours prêts à trousser un jupon et à boire sans soif. — (Blaise Cendrars, L'or, 1960, Folio, page 20)
    • « Là, je crois, cher Ilya Evseitch, que vous exagérez un peu… il n’est pas très sympathique, mais je le connais bien, ce n’est pas un si mauvais bougre… » — (Nathalie Sarraute, Enfance, Gallimard, 1983, collection Folio, page 198)
    • Il la coquait sans arrêt comme s'il avait hâte de rattraper des années d’abstinence forcée et elle s'amusait plus de ce qu'elle tenait pour des gamineries de bougre trop savant, qu'elle ne jouissait vraiment. — (Raphaël Confiant, Le nègre et l'amiral, Éditions Grasset & Fasquelle, 1988, chapitre 5)
  4. (Par extension) Personne misérable ou malchanceuse.
    • J’ai eu peur de lui jusqu’au jour où mon oncle Joseph lui a donné dix sous et lui a parlé :
      « Comment ça va, Désossé ? »
      Et en s’en allant il a dit : « Pauvre bougre ! il ne mange pas tous les jours. »
      — (Jules Vallès, L’Enfant, G. Charpentier, 1889)
    • Le bougre s'était trouvé aux premières loges, avait passé deux jours et deux nuits, gardant toujours son pont et sans rien comprendre, mais écoutant siffler, gronder et péter à ses oreilles tous les projectiles de la création. — (Marcel Martinet, La maison à l'abri, 1918)
    • Pour tous les bougres qui braconnent
      Dedans la Sologne aux bourgeois,
      Ça n'est pas quand la lune donne
      Qu'il faut aller au bois:
      — (Gaston Couté, La chanson d'un gars qui a mal tourné)
    • Les criminels responsables du meurtre de tant d'êtres voyaient impunément grossir leurs immondes bénéfices et leurs boutonnières rougir, tandis qu'afin que leur guerre se prolongeât, une justice sommaire abattait les pauvres bougres, coupables ou non de la moindre défaillance ! — (Victor Margueritte, Debout les vivants!, 1932)
    • Autrefois, quand j'étais « cavé », comme dit Tacherot, je hantais de bons bougres qui rêvaient de reprise individuelle. Ça leur coûtait cher. — (Victor Méric, Les Compagnons de l’Escopette, Éditions de l’Épi, Paris, 1930, page 187)
  5. (Louisiane) Mec, pote, gars.
    • Comment les affaires, bougre ?

Synonymes modifier

Dérivés modifier

Traductions modifier

Interjection modifier

bougre \buɡʁ\

  1. (Populaire) Servant à marquer la colère.
    • – Quand je pense, disait-il, que, si j’étais resté dans l’armée après l’autre guerre, j’aurais ma retraite aujourd’hui. Je l’aurais, mon jardin, avec tout le temps pour le cultiver. Ah ! bougre de bougre de bougre de bougre ! — (Jean L’Hôte, La Communale, Seuil, 1957, réédition J’ai Lu, page 13)
  2. (Populaire) Interjection exprimant une évidence.
    • — C’est la Pauline Richard, expliqua-t-elle. Celle qui tenait la Civette, autrefois. Vous l’avez connue ?
      Bougre, si je l’ai connue !
      — (Bernard Clavel, Les Fruits de l’hiver, chapitre 69, Robert Laffont, 1968)

Synonymes modifier

Prononciation modifier

Anagrammes modifier

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Voir aussi modifier

Références modifier

Ancien français modifier

Étymologie modifier

(XIIIe siècle) Variante de bogre signifiant « hérétique » au XIe siècle, puis « débauché » au XIIe siècle, lui-même issu du latin bulgarus « bulgare ». Voir bougre.

Nom commun modifier

Cas Singulier Pluriel
Cas sujet bougres bougre
Cas régime bougre bougres

bougre *\bow.ɡrə\ masculin

  1. (Religion) Hérétique.

Dérivés modifier

Dérivés dans d’autres langues modifier

Références modifier

Occitan modifier

Nom commun modifier

bougre [buɣɾe] masculin (graphie mistralienne)

  1. Variante de bogre.