Utilisateur:Xavier66/Orthographe néerlandaise

Orthographe néerlandaise comparée à l’orthographe française

Approches française et néerlandaise

Depuis la réforme de l’orthographe néerlandaise de 1995, il existe une différence fondamentale entre les deux approches. Jusqu’à cette date, la manière d’écrire un mot correctement était essentiellement basée sur le bon usage, tel que l’a si bien décrit Maurice Grevisse. C’était vrai aussi dans les pays néerlandophones. L’usage de l’honnête homme prévalait. Certes, il y eu plusieurs réformes acceptables pour tous, notamment celle de 1954. Cependant, avec la réforme de 1995, ce n’est plus le bon sens ni le bon usage qui font la loi, mais l’Union de la langue néerlandaise (Taalunie), des linguistes, nommés par les gouvernements néerlandais et flamand, qui, du haut de leur tour d’ivoire, édictent des règles ayant leur logique interne, mais allant souvent à l’encontre de l’usage. De plus, ces réformes sont comme trop fréquentes; chaque nouvelle génération apprend sa propre orthographe. Sous prétexte de simplifier, ils prétendent abaisser le seuil de difficulté. D’une part certaines règles sont simplifiées à juste titre. D’autre part, surtout en ce qui concerne les mots composés, la confusion est totale. Si en France la vénérable Académie française, gardienne de la langue, fait toujours autorité, en Hollande et en Flandre il n’y a que la Taalunie. Voici quelques exemples de ce manque de logique linguistique, du moins si on admet qu’il existe une logique universelle.

Jusqu’en 1995, on écrivait aktentas, dont l’équivalent français porte-documents montre bien qu’il faut le pluriel à documents, ce qui était le cas avec akten, pluriel de akt. Or, selon la nouvelle règle, dans les mots composés, si le premier éléments a son pluriel uniquement en –en, il faut, même à contresens, mettre le pluriel dans ces mots composés. Comme akt a aussi aktes comme pluriel, il fait exception, d’où aktetas. Et qu’importe de savoir la serviette est destinée à porter un ou plusieurs documents. À mon sens, il s’agit d’une règle obtuse uniquement destinée à faciliter l’orthographe aux plus ignares, ce qui est encore un leurre, car les analphabètes, s’ils ne font aucun effort, n’accéderont jamais à un semblant d’orthographe.

Pannenkoek, autre petit monstre. Il s’agit de la crêpe. Tout le monde disait et dit encore pannekoek, uniquement pour l’euphonie. Pourquoi mettre au pluriel un élément qui, selon toute logique, devrait rester au singulier ? Une crêpe ne se met tout de même pas dans plusieurs poêles. Le pluriel de pan étant pannen, il a fallu que toutes les crêperies de Hollande, de Flandre, du Suriname et de Saint-Martin remplacent leurs enseignes par pannenkoekenhuis, pour peu qu’elles le voulussent. Dans pannenset (jeu de casseroles) et pannenwinkel (magasin de casseroles), le pluriel se justifie pleinement. De même dans pannendekkersbedrijf (entreprise de couverture), puisque le toit compte généralement plusieurs tuiles. Alors, faut-il remplacer fietsbel par fietsenbel  ? D’aucuns voient dans ce -n une survivance d’un génitif moyenâgeux. Cela est certainement vrai pour les toponymes, comme ’s-Hertogenbosch, “bois du duc” (Bois-le-Duc), mais est ressenti comme un pluriel dans les noms composés, comme dans kattenstaart. A mon humble avis, s’agissant d’une seule queue de chat on écrirait mieux kattestaart. Au pluriel, kattenstaarten équivaudrait au français “queues de chats”. Autre exemple de manque de logique : dans boomkwekerij, on met boom au singulier, alors qu’ici il s’agit à l’évidence d’un grand nombre d’arbres (arboriculture).

Le pluriel de "boom" est ici tout à fait justifié. Logiquement, on écrirait donc mieux "bomenkwekerij".

On dirait mieux bomenkwekerij. Je plaide pour que lors de la prochaine révision de l’orthographe néerlandaise la règle d’avant 1995 soit rétablie, que l’on accorde le premier élément du composé selon le sens : hondepoep, kattestaart, fietsbel, fietsenstalling, boekenplank, hoedenplank. La graphie de mots tels que pyramide devrait être rétablie, conformément à leur étymologie. En effet, la commission a laissé intacts des mots tels que pyriet, pyrimidine; alors, pourquoi ne pas avoir changé des mots tels que bibliotheek et apotheek en biblioteek et apoteek ? Commentaire de ma femme (native de La Haye) : “Het is om uit je vel te springen!” (C’est à se prendre la tête). Pour régler le problème à la satisfaction générale, il suffirait tout simplement d’officialiser le “livre blanc” (“Het Witte Boekje”). Il serait effectivement rétrograde de préconiser le retour au ph, comme dans telefoon.

Autre exemple frappant : ruggengraatsverkromming (déviation de la colonne vertébrale). Le terme ruggengraat (littéralement arête des dos) suggère que l’homme serait pourvu de plusieurs dos !

J’ai présenté quelques-uns de ces exemples à plusieurs autres locuteurs s’exprimant en ABN en Hollande, et chacun a abondé dans mon sens.

Panneau officiel datant de 2004 reprenant l’orthographe normale de paddestoel (d’avant 1995). L’on s’apercevra que le -n intercalaire aussi inutile que trompeur est en perte de vitesse.

Heureusement, cette orthographe artificielle n’est obligatoire que pour les écrits administratifs et les manuels scolaires. Dans le privé, chacun orthographie comme il l’entend. À côté du “livre vert” officiel existe aussi le “livre blanc” officieux, édité aussi en version informatique et que j’utilise moi-même. Je trouve néanmoins dommage que ce sont ces règles stupides que l’on enseigne à nos enfants et petits-enfants. Appelons de nos vœux la correction de ces aberrations à l’occasion de la prochaine réforme prévue en toute hypothèse pour 2014.

Il y aurait encore beaucoup de choses à dire sur les hésitations que ces réformes entraînent dans l’esprit des braves gens. Tout cela a été fort bien dit, notamment dans les réactions que l’on peut lire sur le site http://www.wittespelling.nl/

Xavier66 15 septembre 2010 à 08:01 (UTC)